in ,

Cancer du sein: Espoir, Plaidoyer et Engagement pour une meilleure prise en charge en Afrique subsaharienne

Réunis à Yaoundé au Cameroun, dans le cadre du troisième congrès de la Société camerounaise de Sénologie et de Pathologies Mammaires ouvert hier jeudi 20 mars 2025, des experts et professionnels africains du domaine, partagent leurs expériences et savoirs, et élaborent des stratégies  dont la finalité est de contribuer à la réduction des ravages de cette terrible maladie qui endeuille de nombreuses familles en Afrique.

Ce n’est plus un secret. Le cancer du sein est devenu un véritable problème de santé publique dans le monde et en Afrique.  Selon l’Organisation Mondiale de la Santé(OMS) en  2022,  2,3 millions de cas féminins étaient recensés, pour 670.000 décès dans le monde. Au Cameroun, le cancer du sein représente  le premier cancer gynécologique. Les défis qui entravent la prise en charge du cancer du sein  au Cameroun sont notamment les diagnostics tardifs et le manque d’équipements adéquats.  Plus de 80% de femmes diagnostiquées arrivent en consultation à un stade très avancé ce qui limite les options des traitements. A cela s’ajoutent une sensibilisation insuffisante, et des possibilités de dépistage limitées qui aggravent la situation. Le thème choisi pour ce 3è Congrès à savoir « Cancer du sein en Afrique subsaharienne : de grands défis pour de faibles ressources » est fort évocateur de la nécessité de réfléchir en synergie sur l’optimalisation de la prise en charge des cancers du sein qui passe par la formation du personnel et l’amélioration sans cesse du plateau technique dans la sous-région.

« Le gouvernement du Cameroun a signé des conventions avec des partenaires étrangers afin de doter les régions du Centre et du Nord d’instituts du cancer. Il s’agira des structures qui permettront une prise en charge complète partant du diagnostic à la radiothérapie en passant par la chimiothérapie , sans oublier l’important volet chirurgical ; l’objectif étant de contribuer à la réduction de la mortalité due au cancer en général et au cancer du sein en particulier  et de réduire de manière significative les demandes en évacuation sanitaire vers les pays étrangers » a déclaré le Secrétaire général du ministère camerounais de la santé publique le Pr Louis Richard Njock, qui a présidé la cérémonie d’ouverture de ce Congrès le 20 mars 2025. Pour lui,  « la lutte contre le cancer du sein nécessite un engagement collectif et des actions concrètes pour changer le coût de cette maladie dévastatrice. C’est le sens même de cette collaboration internationale que nous appelons de tous nos vœux ; les échanges avec les participants venus d’autres pays du continent, vont permettre à coup sûr d’élaborer ensemble des stratégies efficaces pour la prise en charge des cancers du sein. Ce n’est qu’à travers une coopération internationale que nous développerons des stratégies efficaces pour vaincre cette maladie ».

Le Président de ce 3è Congrès, le Prof Jean François MEYE, Doyen honoraire de la Faculté de Médecine de Libreville, chef du département de Gynécologie Obstétrique dans ladite faculté et Directeur Général du CHU Mère-Enfant de la Fondation Jeanne EBORI de Libreville, conduit la délégation gabonaise à ces assises de Yaoundé qui se tiennent du 20 au 21 mars 2025. « Notre implication à tous pourra permettre à ce fléau d’être freiné, d’être au moins contenu » a-t-il souligné avant d’ajouter que «  je voudrais solliciter à l’ensemble des participants de sortir de ce Congrès avec le souci et la ferme volonté de considérer que nous avons là face à nous une guerre que nous devons mener car des personnes qui sont malades  non seulement sont d’abord nos parents , sont des citoyens mais nous avons constaté que ce sont souvent des personnes jeunes qui sont abandonnées et nous avons la responsabilité aux côtés de nos gouvernements à apporter une solution à ce groupe de personnes en situation de faiblesse ».

Venu du Tchad, le Pr Foumsou Lhagadang, Gynécologue Obstétricien, Doyen de la Faculté de Médecine de Ndjamena  reconnait lui aussi que « le cancer du sein est un problème de santé publique au Tchad, parce qu’il est le deuxième cancer après le cancer du col, il représente environ 25% des cancers gynécologiques. Les difficultés, c’est le problème de diagnostic. Nous avons environ 4 CHU au niveau desquels nous avons des moyens de dépistage ; le dépistage se fait de plus en plus pendant la période d’octobre rose mais il ya pas de dépistage de masse ; il ya de cela environ 6 ans qu’on vient de mettre en place le programme national de lutte contre le cancer du sein ; le dépistage n’est pas vraiment bien organisé, mais pendant certaines périodes la société de gynécologie obstétrique du Tchad , le Programme national de lutte contre le cancer organisent de temps à autre des campagnes de dépistage , mais c’est pas bien structuré » dit-il.

Même si dans ce pays les campagnes de sensibilisation sont de plus en plus faites par des sociétés savantes, les moyens de dépistage sont de plus en plus limités. On note l’absence d’échographes dans les zones périphériques, et l’absence d’appareils de mammographie dans les zones périphériques pourtant le véritable problème se trouve au niveau de la communauté.  Le dépistage se fait en grande partie dans les grandes villes, où il ya vraiment ces équipements, mais la prise en charge est difficile. Les moyens financiers limités posent un problème d’accès. Même si au Tchad l’on est entrain d’évoluer progressivement, il faut dire  qu’au stade actuel, il ya assez de difficultés dans la prise en charge. « Nous allons partager nos expériences, et en partageant ces expériences nous pensons qu’il ya des modèles qu’il faut copier  et les mettre en pratique progressivement pour que nous soyons au même niveau » indique    le Pr Foumsou Lhagadang.

Dans son allocution, le Pr Esther Meka, présidente du Comité d’organisation et Présidente de la société camerounaise de Sénologie et de Pathologies Mammaires(Socasein) a indiqué que « le cancer du sein est le plus fréquent chez la femme car il atteint environ 3 femmes sur 10 et un homme sur 100 ; c’est un fléau mondial, en trente ans le nombre annuel de nouveaux cas du cancer du sein a presque doublé  et atteint aussi bien les femmes jeunes que des femmes plus âgées ; le taux de mortalité reste une préoccupation importante dans nos pays d’où l’impératif nécessité de relever les défis de sa prise en charge efficace pour plus de résultats positifs en Afrique ».

Le Dr Mouelle Michel, chirurgien oncologue et sénologue reconnait que « l’accès au dépistage pose un problème. Les femmes ou les personnes arrivent difficilement à l’hôpital pour  des dépistages, le coût des examens est élevé, l’accès est difficile » ce qui empêche une participation au dépistage de façon optimale. Il souhaite « que l’Etat puisse vraiment accompagner le dépistage du cancer du sein ».

Le Pr Mboudou Emile, président de la Société camerounaise de Gynécologie et Directeur Général de l’Hôpital Gynéco Obstétrique et Pédiatrique de Douala, a lui aussi souligné que  «  le cancer du sein est le premier cancer de la femme au Cameroun. Il dépasse aujourd’hui le cancer du col de l’utérus  et en termes de fréquence des cancers, c’est le premier cancer parmi tous les cancers qu’on diagnostique au Cameroun. Il représente à peu près 27% des cancers qui surviennent chez la femme au Cameroun ». Pour ce qui est des chiffres exacts, le flou persiste encore malheureusement.  « Nous savons que les statistiques peuvent être biaisées parce que nous n’avons que les données au niveau des hôpitaux, si on considère la population en général, le nombre de cancers du sein dépasse des dizaines de milliers par an au Cameroun. Il représente la première mortalité en terme de cancer dans la population camerounaise tout cancer confondu ». Mais il précise qu’au Cameroun le cancer du sein peut être traité dans ses aspects, mais le problème c’est la disponibilité des moyens pour la population qui ne permet pas le traitement de tous les malades.

Pour ce qui est du dépistage massif,  il faut d’abord une sensibilisation afin d’amener les malades à prendre le chemin de l’hôpital pour se faire dépister. Et il faudrait commencer ce dépistage à peu près à 40 ans parce que le cancer survient très précocement dans la population camerounaise. Il ya également le problème de l’éloignement des formations sanitaires des zones rurales.

L’organisation de ce 3è congrès est donc une «initiative louable novatrice et pérenne » a reconnu le représentant du ministre de la santé publique. Elle se veut une plateforme de réflexion sur les problèmes de santé de la femme  en Afrique subsaharienne.

Ericien Pascal à Yaoundé

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

GIPHY App Key not set. Please check settings

Au Cameroun, le CENEEMA lance la Campagne de Mécanisation Agricole sur toute l’étendue du territoire national

Entrepreneuriat jeunes au Cameroun: Dr Joe Ngalle, expert en économie, inspire les étudiants de l’Université des TIC